mercredi 19 mai 2010

La dernière lettre à une mère


Lundi, le .....
Chère Mère,
Depuis quelque temps, je ne puis plus rester assis sur mon lit qu'une demi-heure par jour; sinon, je suis couché. Mon coeur n'en peut plus. Tôt ce matin, le professeur a dit quelque chose, que je n'ai pas pu très bien comprendre, mais qui semblait être: «s'y résigner».
Se résigner (se préparer) - oh, Mère - à quoi? C'est si dur de mourir jeune! Me préparer à être un défunt au début de la semaine prochaine, alors que je ne suis pas prêt. Les douleurs deviennent pratiquement insupportables; mais ce qui l'est réellement (insupportable), c'est que je ne suis pas prêt. Les souffrances m'enveloppent; et dans l'heure qui suit, elles peuvent me submerger, et Je ne puis me défendre. Le pire: quand je regarde vers le ciel, je le vois chargé de sombres et tristes nuages: la mort. Il se fait nuit, mais sur moi ne brille aucune étoile vers laquelle mes yeux pourraient se fixer quand je sombrerai.
Mère, je n'ai jamais été pieux; mais plus que jamais, je sens maintenant qu'il y a quelque chose que nous ne connaissons pas, quelque chose de mystérieux, de sombre, une puissance dans les mains de laquelle nous tombons, à toutes les questions de laquelle nous devons répondre, et c'est un tourment pour moi que je doive la craindre avant de mourir; que je ne sache pas qui elle est; que ce qui est élevé là-haut me semble si étrange, si inconnu, si inquiétant. Oh, Mère, si je pouvais Le connaître!
Tu m'as dit comment je dois me comporter dans la vie, comment il faut se vêtir, se nourrir, agir pour ne pas heurter son prochain. Tu as pris soin de moi, comme seule une maman peut le faire. Je me souviens encore d'une prière du soir que tu as plus d'une fois prononcée devant moi. Tu nous as recommandé l'honnêteté. Mais, oh Mère, tout cela, à l'approche de la mort, s'effrite dans mes mains, se consume ... Ah, pourquoi nous as-tu parlé de tant de choses - mais pas de Jésus-Christ? Pourquoi ne m'as-tu pas fait connaître le bruit de Ses pas pour que je puisse remarquer s'il s'approche de moi en cette nuit de solitude de la mort, pour que Je puisse savoir si Celui qui m'attend est un Père?! Il est maintenant trop tard; je ne pourrais plus comprendre, je suis trop faible. Mais comme je pourrais mourir autrement, si, au travers de ces nuages, une étoile se mettait à briller sur celui qui sombre dans les flots - ah, ce serait bien plus que le soleil, le soleil du matin! Aujourd'hui, aux premières heures, les infirmières ont chanté un cantique. Je pense que les paroles en étaient:
«Jésus, douce lumière, la nuit est maintenant passée . . .»
Ici s'arrête la lettre. Les infirmières ont trouvé un cadavre. Dans ses mains, il y avait cette lettre écrite en tremblant, comme à la hâte.
"C'est pourquoi, selon ce que dit le Saint -Esprit: Aujourd'hui, si vous entendez sa voix,
N'endurcissez pas vos coeurs."
Hébreux 3: 7,8

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